lundi 31 décembre 2012

Tous nos voeux à la RTBF !

Elle en a bien besoin, la pauvre !!!

 
Et vous ? Quelle radio/télévision souhaitez-vous pour 2013 ?

samedi 29 décembre 2012

Vous avez dit populiste ? Comme c'est populiste...


Par un de ces curieux hasards de la vie qui font se télescoper des informations a priori sans rapport les unes avec les autres, le discours de Noël de notre Souverain et la polémique qu'il a suscitée nous amènent, par un chemin plus court qu'il n'y paraît a priori, au tout nouveau Contrat de gestion de la RTBF, adopté vendredi dernier, en fin de soirée, par son Conseil d'Administration.

En page 3 d'un document qui en compte septante-huit, quelque part au milieu d'une fastidieuse énumération de « Etant préalablement entendu ce qui suit », on trouve la phrase suivante :  
« La RTBF refuse toute forme de populisme dans ses programmes, veille à en expliquer les simplismes et les dangers et donne aux citoyens les clés et les outils pour lutter contre celui-ci. » 

Si l'on comprend l'intention - louable - qui sous-tend la démarche, sa formulation n'en soulève pas moins certaines questions dont la principale, évidente, indispensable au débat : Qu'entend-on, au juste, par "populisme" ? Le Contrat de gestion reste muet à ce sujet. Il faut donc nous en référer à notre intuition, à notre analyse, à notre expérience.
Celle des récentes campagnes électorales, présidentielles en France et communales en Belgique, nous ont donné le spectacle de certains candidats, parfois aussi opposés sur la forme que sur le fond, n'ayant pourtant que ce terme à la bouche, dans le but, à peine dissimulé, de river son clou à l'adversaire ou tout au moins, de le discréditer : Populiste ! disait l'un. Vous même ! rétorquait l'autre.
On avance, et le débat démocratique, encore plus !

Et voilà que ce vendredi matin, c'est la RTBF elle-même qui, revenant sur la polémique soulevée par le royal discours, posait enfin la question tant attendue : « C'est quoi, le populisme ? » donnant, pour y répondre, la parole au sociologue Richard Lorent, auteur de "L’antipolitique – Les mots piégés de la politique" :
« Ce spécialiste, préfère plutôt éviter l'utilisation du terme "populiste". Ce qualificatif étant selon lui, essentiellement fourre-tout et disqualificateur pour l’adversaire. »

Ouf ! Nous ne sommes pas les seuls, trouvant ce mot trop souvent galvaudé, à le prendre avec des réserves, globalement pour cette même raison qu'il veut dire tout et son contraire et qu'il deviendrait donc facile d'évincer un interlocuteur, de contester un reportage, d'écourter un débat en invoquant ce motif.

Du reste, si l'on excepte le fait qu'à la tête des mouvements populistes, on trouve souvent un leader charismatique "qui veut devenir calife à la place du calife", il faut bien admettre que, dans un monde où les inégalités se creusent chaque jour un peu plus et où les richesses sont concentrées dans les mains d'une minorité, nous pourrions être nombreux à nous reconnaître dans cette définition succincte : « Le populisme met en accusation les élites ou des petits groupes d'intérêt particulier de la société. Parce qu'ils détiennent un pouvoir, le populisme leur attribue la responsabilité des maux de la société : ces groupes chercheraient la satisfaction de leurs intérêts propres et trahiraient les intérêts de la plus grande partie de la population.» 
Heureusement, il y a d'autres critères pour faire un tri plus subtil et ne pas précipiter dans ce panier tous ceux qui souhaitent, tout simplement, un monde où les richesses seraient réparties de manière plus équitable...

Mais au-delà de l'aspect terminologique de ce passage du Contrat de gestion, il y a cette autre interrogation : si la RTBF éprouve le besoin de mentionner explicitement qu'elle refuse le populisme, pourquoi ne le fait-elle pas d'autres dérives, tels que la démagogie, le poujadisme ou les extrémismes ?
Veiller à expliquer les simplismes et les dangers qui menacent la démocratie et donner aux citoyens les clés et les outils pour lutter contre ceux-ci, ou plus généralement, donner aux citoyens les clés et les outils pour appréhender le monde dans lequel il vit afin, notamment, qu'ils ne succombent pas à des courants de pensée séduisants mais dangereux... n'est-ce pas là l'essence même du service public ?

Nous avons pas encore eu le temps d'analyser l'ensemble du Contrat de gestion : eh oui, nous avons une vie en dehors de notre intérêt pour les médias... Mais de deux choses l'une, soit il a été vidé de sa substance au point qu'il soit devenu impératif de préciser ce qui découle normalement et naturellement des missions du service public, soit le Contrat de gestion est clair et dans ce cas, cette phrase n'a aucune raison d'y figurer, sorte de pièce rapportée, pour ne par dire cheveu dans la soupe, qu'on a souhaité placer là, à tout prix...

Pour quelles raisons ? La réponse nous échappe, mais notre conclusion sera mot pour mot, et c'est amusant, la même que dans l'article de la RTBF sur le discours du Roi :
« Seuls ses auteurs le savent. »
Qui sait, si ça se trouve, ils se connaissent...

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Pour aller plus loin dans la réflexion sur le(s) populisme(s) :
L'émission Samedi + (Martine Cornil) du 15/12/2012 - Silvio Berlusconi, le retour


dimanche 23 décembre 2012

Combat de riches...



C’est la question qui semblait tarauder son administrateur général Jean-Paul Philippot, dans un article paru le 7 novembre dernier dans Le Soir, annonçant dans la foulée que la vente des bâtiments Reyers était envisagée comme piste de financement alternatif:
« Les responsables de la RTBF et de la Fédération Wallonie-Bruxelles examinent la piste du « sale and leaseback », cette technique financière qui consiste pour une société à vendre ses actifs à une entreprise spécialisée qui va ensuite lui louer ceux-ci pour une durée déterminée. L’avantage? Un gain en capital immédiat.» 

« Ce que je ne veux pas pour la RTBF, c’est un plan social », insistait à son tour la ministre de tutelle, Fadila Laanan, vendredi soir, après l'adoption par le conseil d'administration du nouveau contrat de gestion 2013-2017. Et d'ajouter que la vente du patrimoine devrait, par ailleurs, amener "un peu de souffle" à l'entreprise...

Admirable convergence des points de vue !


Dans une interview devant le sapin de Noël , la Ministre le rappelait : « Nous sommes dans une situation sociale qui est difficile, mais les solutions envisagées permettront à la RTBF  d’être dans un contrat de gestion ambitieux mais réaliste ... et qui permettra même de rêver à des projets nouveaux » (si si).

Pas de licenciements secs...

On ne licencie pas, on se contente "juste" de ne pas remplacer le départ à la retraite d'un sexagénaire sur trois, soit une cinquantaine de personnes. Certes, mais on peut tourner la chose comme on veut, diminuer sans remplacer revient, au bout du compte, à augmenter la charge de travail de ceux qui restent...
Est-ce cela, « éviter un plan social » ?

Et qu'en est-il des pigistes, dont rien, absolument rien ne garantit l'avenir au sein de l'entreprise ? A quelle sauce seront-ils mangés ?

Ce lundi 17 décembre, nous avons publié ici même, une lettre anonyme de l'un d'entre eux. En quelques jours, cette lettre a été lue par plus de cinq mille internautes et a suscité de nombreux commentaires. Bien sûr, on pourra toujours arguer du fait que ces témoignages, puisqu'ils sont anonymes, ne prouvent pas grand chose, pour ne pas dire rien, et qu'ils émanent sans doute de gens mal dans leur peau, de passéistes ou de revanchards qui ont de vieux comptes à régler avec la Grande Maison où ils n'ont pas su trouver leur place... Argumentation classique pour balayer d'un revers de la main toutes les critiques, d'évacuer tous les sujets qui fâchent.
En tant qu'auditeurs et téléspectateurs attentifs et attachés à la notion de service public et donc, amenés à faire part de nos critiques, nous avons pu "apprécier" par nous-mêmes ces visions caricaturales et réductrices qui faisaient de nous des "cybernostalgiques" aigris, des éternels râleurs incapables de vivre avec notre temps. On s'y fait, à ces sobriquets et à cette morgue qui coupe court à tout dialogue, ou bien on passe à autre chose, de guerre lasse... Mais de l'intérieur, comment vit-on cela ?

Anonyme, critiquable, subjective... Peut-être, mais cette "bouteille à la mer" et les commentaires qu'elle a suscités, renforcent le sentiment que l'on a, de l'extérieur, sur les choix de programmation et sur cette lente descente vers le formatage des émissions, entamée depuis longtemps déjà mais qui est, depuis quelques années, passée dans une phase d'accélération spectaculaire autant qu'inquiétante !

Aux constats affligeants et affligés sur les préférences, tantôt farouchement niées, tantôt décomplexées, pour « l'infotainment » et la télévision (surtout la télévision) « de divertissement passif », s'ajoutent bien des questions sur la gestion même de l'entreprise publique autonome à caractère culturel qu'est la RTBF (sans oublier ses filiales : RMB, Casa Kafka, DreamWall, Keywall, Sonuma, Feri et Frey).



La gestion des ressources humaines, notamment, a de quoi laisser pantois... La souffrance est palpable, entre besoin de parler et peur de le faire autrement que sous couvert de l'anonymat. Peu crédible ? La vitesse à laquelle l'article s'est propagé, via les réseaux sociaux, tendrait à prouver plutôt que cette lettre "parle vrai" et que ce qu'on y décrit ne peut plus être tu. Les statuts de pigistes se multiplient, deviennent la règle, permettent de pouvoir compter sur un personnel docile qui jamais ne cherchera à sortir du cadre qu'on lui a déterminé. D'autres sont ballotés d'un rôle à un autre, d'un tiroir à un autre tiroir, placardisés, réduits à exécuter des programmes clé sur porte conçus par des sociétés privées...

Dans le même temps, nous dit un autre de ces anonymes, « vous subissez les effets de la gestion de l'armée pléthorique des dirigeants mise en place par Jean-Paul Philippot. Ils donnent l'impression de fonctionner comme s'ils étaient chez Belgacom, Axa ou Procter & Gamble, au point que de nouvelles dispositions vous semblent complètement déconnectées du quotidien de la petite minorité de personnes qui produisent toujours des programmes. Beaucoup de ces directeurs qui vivent en vase clos pratiquent le mépris, qu'on doit sans doute enseigner dans les hautes écoles de gestion. On dirait qu'ils gèrent plus leur prochain rebondissement vers une autre société que leur domaine actuel. »

A la lueur de ce qui se profile à l'horizon, tout cela fait sens, bien évidemment ! Et il y a de quoi s'inquiéter grandement de l'avenir de la RTBF, lorsqu'on entend parler de « trouver de l'argent frais » ou de « réaliser des actifs » ... En y allant de la vente de ses bâtiments en « sale and leaseback », le risque est grand que la RTBF n'ouvre la voie à un démantèlement programmé, comme ceux qu'on a déjà connus par le passé pour des entreprises publiques devenues, méthodiquement et par étapes successives, des sociétés privées.
«La vente du patrimoine, par ailleurs, devra amener un peu de souffle à l'entreprise », nous dit Fadila Laanan. C'est un oxymore ?
Quand bien même cela apporterait un peu de souffle (= liquidités), c'est évidemment la façon dont ce "capital" sera utilisé qui importe, dans quoi il sera investi...Si c'est pour améliorer le sort des travailleurs, auquel semblent tellement tenir Jean-Paul Philippot et Fadila Laanan, très bien... Mais compte tenu des témoignages qui continuent de nous arriver, cette perspective paraît peu probable.

« Le groupe audiovisuel public va recevoir 1,5 million d’euros » nous dit-on ici. Le « groupe », c'est très différent de « la RTBF »... et il y a, dès lors, toutes les chances pour que ce million et demi d'euros échoue dans la poche de cadres de la RTBF... sinon de l'une de ses filiales.

Mais on les entend hurler d'ici au procès d'intention ! Ah, les choses seraient tellement plus simples (saines) si les citoyens, parce qu'ils contribuent au financement de la RTBF à hauteur de 70%, avaient un droit de regard sur les comptes de l'entreprise... Des comptes détaillés, car des bilans, ça ne signifie pas grand chose. Que coûtent les heures d'antenne consacrées au Football ou à la Formule 1 et à leurs envoyés spéciaux ? Combien coûte l'émission The Voice et combien rapporte-t-elle ? Combien a coûté la construction des studios Media Rives ? Que représente la masse salariale des travailleurs et combien représente celle des directeurs ? Y a-t-il des primes à l'audimat ?
Histoire, le cas échant, de faire taire les mauvaises langues, et d'être en mesure d'apprécier si, oui ou non, les choix des ingénieurs commerciaux aux commandes de la RTBF sont compatibles avec le statut d'entreprise publique autonome à caractère culturel qui lui correspond... ou s'il ne s'agit pas plutôt d'invoquer, la main sur le coeur, le sort des travailleurs, tout en lorgnant cyniquement sur le « retour sur investissements » dont les mêmes, toujours les mêmes, bénéficient au bout du compte. Jusqu'au jour où, à tant tirer sur la corde...

Mais n'anticipons pas, car voilà qu'entretemps, le contrat de gestion a été signé vendredi soir, et des échos qui nous reviennent, globalement positifs... Un certain nombre de suggestions auraient été entendus (suppression des coupures publicitaires et du placement de produits, médiation,...).
Tout en nous réjouissant, si tel est le cas, il nous est difficile à ce stade, et tant que nous n'aurons pas vu la couleur de ce contrat, de chanter victoire uniquement sur la base d'articles, d'interviews ou de déclarations qui ne sont jamais, après tout, que des exercices pratiques de communication bien rôdés.

Et quand bien même il y aurait vraiment de quoi se réjouir, il serait illusoire de penser que par la magie d'un contrat de gestion, les professionnels de la RTBF, journalistes, réalisateurs, producteurs, cadreurs, techniciens du son, scriptes, statutaires ou pigistes... puissent concrétiser valablement les missions du service public sans une profonde remise en question de la part de la direction sur ses méthodes de management à coup de « La situation est difficile, accrochez-vous, car seuls les plus forts résisteront aux changements. Ceux qui sont trop faibles tomberont en chemin. »


Trouver de l'argent pour combler les mauvais choix - peut-être même la gabegie - de ceux d'en haut, tout en faisant croire que c'est pour soulager ceux d'en bas et en les dressant les uns contre les autres au quotidien...

Combat de riches !

Nous n'y souscrivons pas.

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lundi 17 décembre 2012

Bouteille à la mer d'un pigiste anonyme de la RTBF



Nous relayons ici 
un message de Christine Bika, 

qui nous a transmis cette lettre, 

témoignage anonyme d'un travailleur, pigiste à la RTBF.


Ce type de témoignage inquiétant, nous l'avons déjà reçu auparavant sans pouvoir le relayer, faute d'accord des personnes concernées.

Vous ne lirez pas ceci dans la presse, et moins encore à la RTBF:

 «  A vous tous, je relaie cette "bouteille à la mer" de quelqu'un qui n'ose plus s'exprimer dans un de nos services publics, la RTBf.

Il y a un peu plus de vingt ans, lors de l'introduction de la publicité à la RTBf, je me suis fendue d'une longue lettre à son C.A, lequel ne m'a jamais répondu. En revanche, ma lettre a fait le tour des rédactions et j'ai reçu, des mois durant, des réponses de personnes qui, à l'époque, étaient des personnes de référence dans les domaines de la radio... . Je pensais qu'on introduisait le ver dans le fruit. Que c'était dangereux... je crains ne pas m'étre trompée. Lorsque je lis le témoignage qui me parvient, via une source sûre, mais anonyme, ci-dessous, je suis encore plus soucieuse.
Si j'étais administratrice de la RTBf, je m'inquièterais vraiment de l'état du personnel.

Alors je vous adresse ce témoignage.
  • Soit vous êtes politique, en charge d'un service -encore un peu- public et vous devez réagir. 
  • Soit vous êtes militant, actif, et vous devez relayer ceci sur les réseaux. 
  • Soit vous êtes journaliste et vous parlez quelquefois de la RTBf.
Cette bouteille à la mer est trop inquiétante pour être ignorée. Vous n'êtes peut-être pas d'accord avec le tout à la concurrence, tout à la publicité ... parlez-en! Faites le buzz!

Je ne connais pas l'auteur de la lettre. Il est significatif qu'un journaliste ( NDLR: ou un technicien ?) sans stabilité d'emploi craigne de s'exprimer. Dans les autres services publics, le "statut" est la norme habituelle. Pourquoi pas à la RTBf? Avons-nous peur d'avoir des journalistes indépendants?

Merci de diffuser, 

Christine BIKA »



Bouteille à la mer d'un pigiste anonyme de la RTBF


« La télévision, d'Etat ou pas, c'est quand Lubitsch, Mozart, René Char, Reiser, ou n'’importe quoi d'autre qu'on puisse soupçonner d'intelligence, sont reportés à la minuit pour que la majorité puisse s'émerveiller dès 20 heures 30, en rotant son fromage du soir, sur le spectacle irréel d'un béat trentenaire figé dans un sourire définitif de figue éclatée, et offrant des automobiles clé en main à des pauvresses arthritiques sans défense et dépourvues de permis de conduire. »  ( Desproges )



Mesdames, Messieurs,


Cette lettre s'adresse à toute personne qui de près ou de loin participe à l'élaboration du nouveau contrat de gestion de la RTBF, en cette fin d'année 2012.

Je travaille au sein de cette grande maison depuis XX années, sans avoir la chance pour autant de bénéficier d'un contrat.

Je pourrais m'adresser à vous pour défendre le choix de programmes davantage éducatifs et culturels que ceux auxquels la RTBF donne la priorité depuis quelques années. Je pourrais déplorer le fait que les programmes privilégiés fassent large place au placement de produits, là où la mission première qu'induit la notion de service public devrait plutôt oeuvrer au développement de l'esprit critique des citoyens.

Il s'agit néanmoins de choix idéologiques. Aussi, je ne tenterai point de vous influencer sur base des hypothétiques conséquences futures de ces choix. Je préfère attirer votre attention sur leurs répercussions bien réelles et déjà palpables au sein du personnel de la RTBF. C'est au sujet de la souffrance générée par ces choix que je vous écris.

Il est loin, le temps où, à la question de savoir combien de personnes travaillent à la RTBF, on pouvait répondre, sous forme d'une demi-boutade, « la moitié ». La grande majorité des personnes qui travaillent au sein de cette institution y sont entrés par amour des métiers de l'audio-visuel, et souvent aussi dans l'idée de participer, en faisant circuler une information de qualité, à la construction d'une société plus juste et plus humaine... « Une certaine idée du métier » que la récente politique de gestion de la RTBF met à mal au détriment du public, bien sûr, mais aussi de la santé mentale de ceux et celles qui, lorsqu'ils ont choisi ce cadre professionnel, n'avaient pas imaginé devenir un jour des marchands de tapis (que les vendeurs de moquette et autres carpettes ne se sentent pas visés par cette expression).

Je ne suis pas médecin du travail, mais mon emploi du temps m'amène à rencontrer très régulièrement quantité de journalistes, réalisateurs, cadreurs, techniciens du son et scriptes que la politique de gestion actuelle de la RTBF rend malades (au sens propre du terme). Au-delà des choix de fonds concernant les thématiques et contenus des émissions, la stratégie globale de gestion des ressources (humaines ou matérielles) génère de nombreuses souffrances. Il y a 2 ans, le discours de nouvel an d'un haut responsable de la RTBF, tenu dans un de ses centres régionaux, annonçait la couleur en ces mots : « La situation est difficile, accrochez-vous, car seuls les plus forts résisteront aux changements. Ceux qui sont trop faibles tomberont en chemin. » Dans ce contexte où l'on devrait pouvoir compter sur davantage de synergies, « diviser pour régner » semble la règle : les émissions de la RTBF et les personnes qui oeuvrent pour celle-ci se considèrent davantage comme des concurrents que comme des alliés. Le personnel s'interroge sur ce qui a poussé ses dirigeants à détricoter avec tant de volonté ce qui faisait jusqu'il y a quelques années le succès de la RTBF: tous ces rendez-vous avec le public, ces émissions qualitatives qui ont soit déjà été supprimées, soit se trouvent continuellement menacées par la dictature de l'audimat. Aujourd'hui, le mot d'ordre est de privilégier « l'infotainment » (c'est Tron qui le dit, beaucoup se demandent où se trouve la tête), entendez une approche légère de l'actualité, davantage axée sur le sensationnalisme, les faits divers, les « peoples », et la consommation.

Mais si ce personnel souffre, pourquoi ne dit-il rien ? Parce qu'il n'ose pas. Il n'est pas rare que ceux qui ne sont pas d'accord avec cette politique soient « mis au placard ». Il est plus facilement admis, au sein de la maison, qu'une présentatrice de JT joue les femmes-sandwiches pour des marques de strass sur des plages exotiques, plutôt qu'un journaliste ose critiquer la politique de gestion interne. C'est d'autant plus vrai qu'un nombre important de journalistes et autres travailleurs de la RTBF sont désormais cantonnés au statut de pigiste longue durée. Quand votre employeur principal veille bien soigneusement à respecter des interruptions de travail entre deux petits contrats, quelle liberté de parole peut-on espérer de votre part ? Que dire aussi du fait qu'aujourd'hui, de nombreuses émissions sous-traitent toujours plus de projets auprès de sociétés de production privées, alors que l'on reproche au personnel de certains centres régionaux de la RTBF d'être trop inactif ? Il se raconte que certaines personnes bien placées à la RTBF possèdent des intérêts dans ces sociétés privées. Mais sans doute ces conflits d'intérêt ne sont-ils que des rumeurs malveillantes soufflées par quelques esprits jaloux. Ce qui me pousse à vous écrire ceci aujourd'hui, ce n'est pas la jalousie : si on le laisse faire, qui ne voudrait pas aujourd'hui mettre sa famille à l'abri de la crise ?

Non, ce qui m'a décidé à vous confier ceci, c'est ma crainte que parmi les personnes travaillant pour la RTBF qui sont en souffrance psychique, certains ne se contentent plus, à l'avenir, de s'abrutir d'anxiolytiques, pour supporter cette ambiance de travail. Je suis solidaire de tous ces gens qui souffrent de ne plus pouvoir exercer avec fierté le métier qu'ils ont choisi. Je vous prie de m'excuser de maintenir l'anonymat autour de ma personne. Si je n'avais pas de famille à charge, j'aurais le courage de parler à visage découvert.

Permettez-moi toutefois de vous faire savoir, en guise de conclusion, que mes propos n'émanent que de moi, et d'aucun groupe, aucune association, aucun parti politique. A ce sujet, je paraphraserai Pierre Desproges pour vous assurer qu' «A part la droite, il n'y a rien au monde que je méprise autant que la gauche.»

J'espère que vous pourrez un tant soit peu tenir compte de ces quelques lignes au moment de vérifier que celles du nouveau contrat de gestion de la RTBF sont bien écrites dans l'intérêt des citoyens de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Avec mes sentiments les plus respectueux,

Un pigiste déjà trop pigeon

Article lié : Combat de riches

Article à suivre sur le site d'Apache : Derrière les projecteurs de la RTBF, la réalité et le malaise du service public (1)

dimanche 16 décembre 2012

Lettre de la FACIR à propos du Contrat de Gestion de la RTBF

Le FACIR (Fédération des Auteurs, Compositeurs et Interprètes Réunis) a écrit aux Ministres de la Fédération Wallonie-Bruxelles à propos du Contrat de Gestion de la RTBF.

Nous partageons ce document.


Monsieur le Ministre Président Rudy Demotte,
Mesdames et Messieurs les Ministres Fadila Laanan, Jean-Marc Nollet,
Jean-Claude Marcourt, Evelyne Huytebroeck, Marie-Dominique Simonet et André Antoine.


Bruxelles, le 12 décembre 2012,

Le FACIR rassemble l’ensemble des musiciens de la Fédération, tous styles confondus.
Nous sommes les auteurs d’une pétition (2250 signataires à ce jour) manifestant notre refus des coupes budgétaires dans notre secteur.
Et surtout, nous revendiquons la visibilité, et la revalorisation des musiciens-artistes-interprète issus de la FWB.

En tant que citoyens, et musiciens professionnels, nous déplorons l’opacité dans laquelle se négocie le nouveau contrat de gestion de la RTBF pour les 5 années à venir.
Ceci sans concertation avec le contribuable, qui pourtant participera à hauteur de 210.000.000 euros annuellement.
Nous pensons que lors de la rédaction d’un document aussi important  -  un  véritable choix de politique culturelle -, les musiciens-artistes-interprète doivent être consultés.

Sur base de l’ancien contrat de gestion, nous avons relevé 3 points essentiels qui doivent être développés afin que la RTBF remplisse pleinement son rôle de service public:
Donner accès à la culture et à la création (autant qu’au divertissement), attiser la curiosité du public, et promouvoir les richesses culturelles et les artistes de la FWB.


LES PROPOSITIONS DU FACIR:

1) Le FACIR demande la réintroduction à la télévision d’un agenda culturel qui reflète la diversité de la création en FWB (exemple du défunt “Javas”). L’émission doit  passer aux heures de grande écoute, et doit être rediffusée, pour toucher le plus large public possible, et remplir ainsi sa mission de promotion de la culture en FWB. Le cahier des charges doit être clair en matière de diversité: des rubriques détaillées sur le théâtre, la danse, la peinture, le cinema, la sculpture et les arts plastiques, les différents styles musicaux (pop-rock, Jazz, world, chanson, classique…).

2) Les radios de la  RTBF réservent actuellement un quota de 10 % pour les productions des artistes de la FWB, alors que les radios nationales en France dédient 60%, et en Flandre 25%, à leurs artistes. Le paysage audiovisuel belge est envahi de productions internationales, tandis que les productions nationales suffoquent par manque de visibilité.
Le FACIR demande une augmentation de “minimum” 2,5% par an du quota d’artistes de la FWB sur les ondes radio de la RTBF (actuellement de 10%), et ce sur une période de 5 ans (pour arriver à 22,5 % en 2017).
Pour in fine arriver à 25 % dans le prochain contrat de gestion, et s’aligner sur les quotas actuels de la VRT.

Pour être efficaces, ces quotas doivent s’accompagner de quotas valorisant:
*) les nouvelles productions (un délai de 1 an à compter de la date de première diffusion)
*) les nouveaux talents (le premier enregistrement)
Ces différents quotas doivent être également être assortis à des critères de créneaux horaires.

3) Le FACIR demande de redonner l’autonomie de la programmation musicale à chaque animateur ou cellule  de production. La concentration actuelle de la programmation d’une chaine sur un seul programmateur, et la diffusion répétée de quelques valeurs ‘sûres’ et superstars internationales, sont contraires à la mission de diversité d’un service public.
Nous demandons également 2 émissions hebdomadaires (avec programmateurs différents) par genre pour garantir la diversité musicale en FWB.
L’ensemble du bouquet de la RTBF doit assurer ainsi une visibilité pour des genres aussi variés que le rock, la pop, l’électro, le jazz, la world, la soul, le Rap, la chanson,…

D’une manière générale, il est essentiel de rédiger un cahier des charges précis dans le contrat de gestion.
La rédaction actuelle comporte beaucoup de zones floues, laissant à la RTBF une libre interprétation des textes.

Exemple: le texte de 2007 propose le maintient d’une émission « de variété, en télévision, destiné au grand public, à une heure de grande écoute, mettant en valeur, notamment les auteurs-compositeurs, les artistes interprètes et les producteurs de la Communauté française ».

Le FACIR demande de chiffrer la présence souhaitée d’artistes de la FWB (au moins 50%), ou remplacer le mot notamment  par majoritairement. Cela lèvera toute ambiguïté, et évitera de voir la participation des artistes belges réduites à une peau de chagrin.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Minsitre-Président, Mesdames et Messieurs les Ministres, nos meilleurs salutations.

Pour le FACIR,

Claude Semal, Toine Thys, Maxime Blésin, Michel Debrulle, Thomas Turine, Pierre Jacqmin, Julie Jaroszewski, Philippe Tasquin, Clément Nourry

Source : http://www.facir.be/Facir/Actualite_files/Lettre%20du%20FACIR%2012-12-12.pdf
Découvrez également leur site : www.facir.be